Pour rappel, les 12 prévenus étaient inculpés de mutineries (en terme plus judiciaire : dégradations de l'établissement pénitentiaire, menace à l'aide d'une arme sur un dépositaire de la fonction publique...). Sur les 12 prévenus, un seul reconnaît les faits et assure avoir mené tout seul cette "émeute", il s'en explique d'ailleurs dans un texte qu'il a diffusé peu de temps avant le procès.

Dans la semaine qui a précédé le procès, le climat s'est considérablement tendu avec des mouvements de protestation à Clairvaux et à Moulins (où Pascal Brozzoni a d'ailleurs été mis au mitards). Trois évasions ont aussi contribué à alimenter l'actualité carcérale. Ces faits s'ajoutant à la manifestation contre la venue de Juppé une vingtaine de jour auparavant qui avait contribué à crisper la situation locale de Troyes ("le temps de la fermeté est maintenant arrivé", le maire de Troyes, Baroin).

C'est dans ce contexte que les personnes du comité de soutien sont arrivés le dimanche pour un concert prix libre en solidarité avec les inculpés. Ce concert, avec Kommando Pernod, Smell Bad, les Grilles Dégoûts et Nelson Montfort Orchestra s'est déroulé dans une très bonne ambiance devant une centaine de personnes. Une compilation prix libre vive les mutins était d'ailleurs sortie pour l'occasion. Le lendemain, journée assez calme, le débat qui devait avoir lieu le soir se transforme rapidement en réunion de préparation des actions du lendemain. Nous pensions en effet que nous ne pourrions pas rentrer dans le tribunal qui est trop petit (on suppose que la priorité sera donnée aux matons qui organisent un car de Clairvaux pour l'occasion). La question est donc : que peut-on faire pendant le procès ?

Vers 1H du matin, quatre personnes qui collaient des affiches sont interpellées et emmenées au commissariat, nous n'aurons pas de nouvelles de la nuit... Par contre, des nouvelles nous en auront vers 3H du matin, elles viennent du local associatif où de nombreuses personnes sont hébergées... En effet des policiers se sont introduits avec maglight... Ceux-ci sont rapidement sortis du local (c'est privé, ils ne peuvent donc pas rentrer légalement sans mandat) mais sont aux alentours.

Entre 5H et 6H des renforts arrivent avec la ferme intention de rentrer dans le local, chose qui leur est de nouveau refusée (les représentants de l'ordre n'ont pas voulu présenter de papier indiquant la régularité de leur action)... Ils tentent donc par tout les moyens de rentrer : l'ouverture forcée de la porte n'étant pas une réussite, les policiers plient le volet métallique d'une fenêtre, et cassent la vitre pour balancer des gaz lacrymogènes et rentrent dans le local. Les CD de soutien aux mutins sont cassés, divers tracts et fanzines sont déchirés ainsi que tous les exemplaires de l'Envolée présents au Local, les autocollants, les affiches et un classeur du MIB relatant des bavures policières sont emportés. Ils emportent également avec eux des poubelles, et profitent de leur passage pour tout saccager (voir photos) et se laissent aller à quelques grossiers écarts de langage alliant insultes et autres chicaneries de pandore... Ils font sortir tout le monde en dehors du Local et pendant que certains effectuent un contrôle d'identité, le saccage continue à l'intérieur.

À 7h, tous les policiers évacuent le Local sans aucune explication et sans emmener personne. L'atmosphère du Local étant irrespirable, les personnes présentes pour le procès prennent la direction du tribunal pour être sûr de rentrer dans la salle. Nous sommes une bonne cinquantaine à nous présenter devant le tribunal... On nous fait attendre pendant que les matons entrent par une porte de derrière... Seules 5 ou 6 personnes parmi nous ne peuvent pas entrer...

Quand les inculpés arrivent dans la salle du tribunal, Pascal Brozzoni prend tout de suite la parole pour annoncer qu'il veut que les quatre personnes en garde à vue suite à un collage soient libérées avant que le procès ne commence arguant du fait que lorsque les matons font grève leur soutien ne sont pas arrêtés... Le juge déclare ne pas être au courant de ce fait...

Le nouveau juge a fait des efforts par rapport à celui présent le 15 mars : les prisonniers paraissent désentravés et c'est lui qui a insisté pour qu'un maximum de gens puissent rentrer dans le tribunal.

Toutefois, dès le début du procès les avocats demandent à ce que le procès soit reportés pour manque d'instruction et incompétence du tribunal (en effet, les faits reprochés étant très graves, ils relèvent de la cours d'assise) sauf que pour la cour d'assise une enquête est menée, ceux que souhaitent les prisonniers. En effet, les prisonniers demandent qu'une instruction soit diligentée afin d'établir les faits avant le procès et non après. Devant une réponse négative du magistrat, 11 des 12 détenus quittent la salle en refusant de se défendre et en interdisant à leur avocat de le faire, suivis de la totalité des personnes venues en soutien.

Le procès sera suspendu et reporté au 23 mars, jour où les débats reprendront où ils se sont arrêtés c'est à dire sans les 11 inculpés.

Nous profitons ensuite de l'après midi pour apporter à manger aux 4 personnes en garde à vue. Les policiers refusent les denrées en précisant que seul l'avocat peut apporter à manger aux gardés à vue (suite à une nouvelle loi de moins d'un mois...) puis nous expulsent violemment du commissariat. Nous déployons donc une banderole sur la grille du commissariat. Les policiers font tomber à terre l'une des personnes qui était en train de l'accrocher et gazent les personnes aux alentours... Une fois de plus ils nous auront montrés leur tact !

Suite à cela de nombreuses personnes rentrent chez elles pendant que d'autres attendent la libération des 4 prévenus, celle-ci interviendra lors de la 23ème heure de garde à vue vers 23H le mardi soir. Les 4 inculpés se verront notifier une convocation au tribunal ils sont accusés de dégradation de bien public (la mairie de Troyes veut leur mettre sur le dos tous les tags présent sur Troyes et les frais de nettoyage relatifs) et d'incitation à la rébellion.

 

Les problèmes judiciaires ne sont donc finis ni pour les mutins ni pour les militants anti-carcéraux.



Depuis les incidents, aucune justification ne nous a été apportée sur les raisons du saccage du Local par les autorités.